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LE REALISATEUR DE "INDIGENES" L’A REVELE

Bientôt un film sur les massacres du 8 Mai 45

lundi 2 octobre 2006, , article écrit par Le Soir d’Algérie et publié par La rédaction


En réalisant son film Les Indigènes, Rachid Bouchareb savait qu’il allait créer une petite tempête, qu’il allait sûrement participer à lever un peu le voile honteusement mis sur l’histoire de l’ex-empire colonial français, puisque là était aussi son but. Il espérait aussi, que son film Les Indigènes contribuerait à rendre justice aux combattants étrangers, venus du Maghreb, d’Afrique et d’Asie prendre part au combat contre les nazis et pour la libération de la France alors qu’elle maintenait, elle, leurs pays sous domination.

Mais ce sur quoi le réalisateur était loin de parier, c’est cette déferlante qu’allait créer son œuvre cinématographique. Il y a eu d’abord, dès la sortie du film en salles, et là c’est un comble, cette décision de Chirac de décristallisation des pensions, en rétablissant l’égalité entre les prestations versées aux anciens combattants français et étrangers comme si le président français, qui s’est dit « ému » par le film, découvrait pour la première fois le sacrifice des combattants des ex-colonies pour libérer l’Hexagone. Il y a eu aussi et il y a encore ces files ininterrompues de spectateurs qui viennent chaque jour pour voir le film, et qui ressortent pour certains bouleversés par ce qu’ils ont vu, parce qu’ils ne savaient pas ou d’autres soulagés qu’on commence enfin à parler ici en France d’une histoire longtemps tue. Et parmi ces derniers, ce mail reçu de Myriam, une jeune comédienne « issue de l’immigration », qui m’écrit : « Hier, nous sommes allés voir avec Mohamed (son compagnon algérien, musicien) le film Indigènes. C’est un très beau film, juste, émouvant et même drôle par moments. Vu le contexte actuel, ce film remet des choses en place. Tant mieux, je sais que ça n’a pas été facile de trouver des partenaires au départ et finalement, avec la persévérance et la détermination, ce film existe et va sûrement éveiller des consciences. » Il y a enfin, et c’est totalement inattendu et indescriptible, ce nombre incalculable de textes, d’ouvrages, de tables rondes, de débats qu’aura suscités ce film et qui occupent aujourd’hui la scène. Et en cela, Les Indigènesauront libéré la parole. Ainsi, ici, beaucoup de titres de presse non seulement évoquent le film en rendant hommage à Bouchareb pour son œuvre utile à la mémoire collective mais nombreux sont ceux aussi qui demandent à ce que l’on ne s’arrête pas à cette période de l’histoire mais que l’on ouvre les dossiers noirs du passé colonial de la France. En attendant, il faut se contenter de cette audace de Bouchareb qui a fait des émules. Le journaliste Charles Onana, dans un très bel ouvrage intitulé 1940-1945 : noirs, blancs bleus, libérateurs de la France, livre fortement illustré de photos d’époque et sorti en librairie le 27 septembre, se veut revoir et corriger la version connue et répandue y compris par l’institution scolaire de l’histoire de la résistance et de la libération, « histoire dans laquelle les populations venues de l’ex-empire colonial sont soit absentes, soit confinées dans un rôle marginal et anecdotique ». Et à propos d’occultation de l’histoire vraie par l’institution scolaire française, le numéro d’octobre du mensuel Historia l’évoque dans un dossier spécial consacré aux Indigènes, la campagne de France des soldats oubliéset dans lequel sont, tour à tour, traitées les conditions de recrutement ; les soldes versées et leur inégalité, les inégalités d’avancement.... C’est d’ailleurs dans ce dossier spécial qu’on apprend par la bouche de Bouchareb, qui répondait à la question de savoir si dans son film il avait renoncé à d’autres scènes et pourquoi : « Le film devait se terminer par le massacre de Sétif en 1945, j’ai préféré garder cet événement dramatique pour un deuxième volet. » Ce n’est donc pas qu’un simple épisode, le meilleur est à venir.

K. B.-A. Le Soir d’Algérie


Le Soir d’Algérie

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