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Pèlerinage à Sétif

Confidences d’expatriés

mercredi 10 août 2005, par La rédaction


Le désir ardent de se ressourcer auprès des leurs a poussé de nombreux expatriés en manque, des années durant, de Rihat Lebled, à se retremper dans l’ambiance familiale qu’on ne trouve nulle part ailleurs.
Les résidents au Québec, à Dubaï, à Lille, à Manchester, à Moscou et dans de nombreuses autres régions de la planète retrouvent, non sans un immense plaisir, Sétif qui est restée, selon nos cerveaux obligés pour diverses raisons de monnayer des compétences reconnues et valorisées sous d’autres cieux, dans les cœurs. La distance estimée à des milliers de kilomètres n’altère en rien l’attachement de ces émigrés envers le Stif natal. Personne ne peut, disent-ils, mesurer notre pouls dès qu’on aperçoit de très loin l’envoûtante cité qui nous attire tel un aimant. « Le plaisir de retrouver les siens, les coins et recoins de la terre natale, les habitudes et coutumes d’antan est indescriptible », nous confie Nazim, un étudiant à Strasbourg. Ce retour aux sources a requinqué ce jeune chercheur qui n’a pas remis les pieds au bled depuis dix ans. Ce Sétifien friand des plats spécifiquement de Sétif tels le couscous, la charba f’rik, lahmis, l’faramssa, leghrif, khobz dar et bien d’autres mets que la maman prépare avec plaisir, constate, au grand dam des adeptes du tout va bien, que l’antique Sitifis qui est envahie par le béton, n’est plus belle et propre comme elle l’était jadis : « La dégradation du cadre de vie est frappant. La prolifération à perte de vue des sachets en plastique mettant en péril l’environnement qui est empoisonné par un tel produit nocif pour les champs m’inquiète. Les autorités doivent à mon sens prendre le taureau par les cornes. » Mourad, ce financier de renom, exerçant dans une grande banque aux Emirats arabes unis, qui s’est départi de son smoking, se laisse aller, se retrempe dans l’ambiance de Tandja, l’un des plus importants quartiers de la capitale des Hauts Plateaux. Ce docteur d’Etat en sciences financières se déconnecte, laisse passer le temps, met de côté le stress, la pression des bilans et des obligations du résultat, et ce, en s’adonnant à d’interminables parties de dominos avec des potes d’enfance qui font abstraction du rang de Mourad, qui s’est au passage défait de ses galons acquis ailleurs. « Pour décompresser d’une année stressante, les vacances auprès des siens sont pour moi la meilleure des thérapies. En retrouvant les miens, je respire la vie. Les longues veillées estivales, agrémentées par des rencontres familiales ou des flâneries à travers la rue de Constantine (principale artère de Sétif, longue de 2 à 3 km) n’ont de semblable nulle part ailleurs. » En l’apostrophant sur l’actualité, le cadre d’un certains rang ne s’empêche pas en bon Sétifien, connu pour son franc-parler et de dire les quatre vérités, se dit offusqué par la dernière sortie des commerçants des quartiers Dubaï d’El Eulma et des abattoirs du chef-lieu, ayant baissé la semaine dernière les rideaux, et ce, à la vue des inspecteurs des impôts : « Le payement des impôts est un autre acte citoyen. La fraude fiscale gangrène l’économie nationale, porte un sacré coup à la qualité des prestations du service public. » Lamri, cet ex-enseignant de l’université de Sétif installé depuis des années au Québec, considère la virée au pays comme un pèlerinage qui permet de décompresser, de recharger « les batteries et de faire le plein du soleil et des parfums de chez nous ». Ne faisant pas exception à la règle, l’universitaire revient sur la fuite des cerveaux et des inexploitées potentialités touristiques dont regorge le pays : « La fuite des cerveaux accueillis à bras ouverts au Canada et ailleurs perdurera car le pays n’encourage pas les compétences, ne valorise pas l’intelligence. Ce n’est pas de gaieté de cœur que les cerveaux algériens mettent leur savoir-faire et leurs connaissances au service des autres. » Sa femme Nicole, qui est folle amoureuse de l’Algérie et de ses pittoresques paysages, enfonce davantage le clou : « L’Algérie est, sans exagération aucune, le plus beau pays au monde. Pour attirer des millions de touristes, il suffit de lancer une vaste campagne médiatique devant mettre en évidence les richesses de la côte, du Sahara et des autres régions. Je ne me lasse pas de voir et de revoir les sublimes gorges de Kherrata et les corniches jijiliennes et bougiotes, figures rarissimes... »

Kamel Beniaiche

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